Le 16/02/2022, des biologistes du PNR du Vexin sont venus à Chars pour visiter les cavités répertoriées dans la liste des lieux d'hibernation des chiroptères (les chauve-souris).
Sur la propriété dont dont je suis titulaire, il y a une entrée de cavité dont une partie est située dans l'emprise cadastrale. C'est une ancienne carrière, cas le plus courant en Ile de France. Je ne sais pas s'il existe des cavités naturelles en IDF, à creuser, pourrait-on dire.
Les carrières sont courantes dans le bassin parisien, puisque c'est un bassin de sédimentation des mers et lacs qui se sont succédés pendant des millions d'années. Les humains ont exploité des carrières de calcaire sédimentaire pour construire. Notre église de Chars fait partie de ces bâtiments construits avec la pierre locale, assez fragile d'ailleurs.
C'est une assez grande carrière, (de l'ordre de 500m²), propice à l'hibernation des chiroptères.
L'équipe m'a montré des choses que je n'imaginais pas et à coté desquelles j'étais passé en cherchant un peu dans les fissures.
Première chose à savoir et c'est très important: NE PAS RESTER SOUS UN INDIVIDU EN HIBERNATION. Les chiroptères s'installent dans les fissures du ciel de carrière (le plafond) . Si vous en voyez un il faut l'observer en se décalant afin que votre chaleur corporelle qui monte ne les perturbent pas.
L'air chaud monte car il est moins dense que l'air plus froid, donc plus léger, les frères Montgolfier l'ont prouvé.
Cette perturbation calorifique est critique pour un chiroptère. Elle peut être interprétée par l'individu, comme un réchauffement dû à l'arrivée de la saison du réveil, et la chauve-souris risque de sortir de son hibernation. Cela est dramatique car si ce n'est pas le moment et qu'on est en hiver, période pendant laquelle il n'y a pas de nourriture, elle devra se remettre en léthargie. L'énergie consommée pour le réveil est très importante et la suite de l'hibernation sera compromise. La chauve-souris verra son hibernation raccourcie et mourra car son réveil avant terme ne lui permettra pas de se nourrir. C'est très important de retenir qu'une chauve-souris ne doit absolument pas, et sous aucun prétexte, être réveillée. Elle saura se réveiller au bon moment.
D'une manière générale, ne pas se tenir sous les fissure, rester sous les zones exemptes de fissures. Observer en se décalant pour ne pas être à l'aplomb.
Deuxième chose à savoir: Ne pas faire de bruit et ne pas insister longuement avec les lumières. Parler à voix basse, éviter la présences de jeunes enfants qui pourraient crier et courir, ce qui occasionne des vibrations. Je pense qu'il vaut mieux mettre les téléphones sur silencieux, bien que dans une cavité les ondes ne passent pas. S'équiper de lampes pas trop puissantes. Bref, être discret et éviter tout ce qui pourrait leur porter préjudice.
Faut-il rappeler que les chiroptère sont essentiels à la biodiversité? Faut-il rappeler que tous les autres habitants, animal ou végétal, de notre planète sont essentiels à la biodiversité, et aux humains, pour leur propre avenir? Faut-il rappeler que les chauve-souris sont menacées par les activités humaines et que certaines espèces sont en voie d'extinction?
Des dépliants sur les chiroptères sont disponible à la Mairie. Sur le site du PNR du Vexin, vous trouverez aussi une information.
Dans cette carrière une trentaine d'individus ont été comptés. Un bon résultat. Parmi elles, certaines sont rares et très fortement menacées. On m'a dit, lors de la visite, qu'une espèce vue en séance, était considérée comme éteinte dans notre région il y a peu, et que c'était une grande satisfaction d'en revoir. Cependant la réjouissance est de courte durée car les comptages par les naturalistes, biologistes et amateurs éclairés, révèlent que les chiroptères sont en diminution du fait de l'anthropisation galopante des milieux.
J'attends avec impatience le rapport qui devrait être transmis par mail.
Sur cette photo, un gros spécimen qui n'hiberne pas dans une fissure...
JR le 17/02/2022
Voici le rapport des experts du PNR sur "ma" cavité. Très clair.
Grande satisfaction de ce bilan. Mon engagement: maintenir les conditions favorables pour le maintien et peut être une augmentation des effectifs. Quand on me demande ce que je vais faire dans "ma" grotte. Je réponds: Rien.
Réponse décevante pour beaucoup de personnes qui fantasment dès que des perspectives d'exploitation de l'environnement se profilent.
En ce qui concerne "les modes de gestion extensifs" dont il est fait mention dans le rapport, il s'agit d'une allusion à la qualité environnementale du jardin autour de l'entrée de la grotte. Extensif s'oppose à intensif. La notion de jardin privée extensif n'existe pas vraiment. Mais on parle d'agriculture extensive. Une gestion extensive consisterait donc à gérer son jardin comme en agriculture extensive.
En ce qui concerne mon jardin, mes modes de gestion extensifs consistent essentiellement à ne rien faire. Il s'agit de maintenir des conditions favorables à la biodiversité: ne pas tondre, laisser les espèces végétales adventices s'installer et prospérer. Ainsi les espèces, particulièrement à floraison, vivent leurs cycles complets pour réapparaître d'années en années. Dans cet environnement, les insectes ont de quoi se nourrir et donc, les chauve-souris qui s'en nourrissent.
Il est vrai que j'exerce une pression non nulle sur le milieu sous forme d'un contrôle léger et le moins invasif possible, à l'aide d'outils de jardin non motorisés, comme la faux, coupes-branches et sécateurs. Principalement ,cela consiste à éviter d'avoir trop de lianes et de ronces, mais il faut qu'il en reste. Ce sont des refuges et des sources de biodiversité. Bien entendu, pas de produits phytosanitaires, sauf ceux répandus généreusement par l'agriculture industrielle locale à proximité de Chars et en bordure du terrain (le terrain jouxte une grande parcelle agricole cultivée en blé et les engins passent de temps en temps pour répandre des choses...mais sans qu'on puisse savoir ce que c'est). Autres actions anthropiques: un jardin potager en évolution et l'élagage d'arbres pouvant porter préjudice à la maison en cas de tempête.
La notion de "milieu naturel" est sujette à caution. Il n'existe que très peu de milieux qu'on pourrait qualifier de naturels sur notre planète. Il n'y a que quelques rares forêts primaires. En France métropolitaine il n'y a, pour ainsi dire, aucun milieu strictement naturel. Tout est anthropisé. A Chars les champs, les forêts, les jardin ne sont pas naturels. Ces milieux pourraient redevenir naturels qu'après la disparition totale des humains pendant des siècles, tant les contraintes et les déséquilibres induits par l'activité humaine sont profondément incrustés. Si à Chars et ses environs, sur des 100aines de km à la ronde, les humains disparaissaient, le contexte environnemental changerait radicalement au bout de quelles centaines d'années. Ce serait toute une biodiversité à peine imaginable qui apparaîtrait. Ce ne serait certainement plus la pauvreté actuelle qui dure depuis des milliers d'années, depuis que l'homme, en proliférant, a développé l'agriculture et l'élevage. Bien sûr il va falloir attendre encore un peu, car les humains, bien que sur la bonne voie, ne se sont pas encore auto-détruits, mais au vu des événements récents, on sent bien qu'ils multiplient les efforts pour y parvenir.
Pour conclure sur la "gestion extensive" :
Le retour d'expérience n'est pas complet puisque l'installation sur site et la "gestion" datent de moins d'un an.
En dehors des chiroptères, les autres espèces qui bénéficient de ce jardin Punk, sont les hérissons, les rongeurs, les oiseaux et, bientôt j'espère, les orvets.
JR le 17/03/2022
Voici deux photos prise très récemment dans la carrière. Merveilleux.
Les chauves-souris sont encore là. L'hibernation va sans doute cesser d'ici peu.
Ces photos ont été prises avec un CANON EOS 50D, distance focale 85mm.
JR le 18/04/2022